Domaine skiable : après la visite du préfet, les incertitudes demeurent
Une visite de M. Ravier, préfet de la Savoie, à Saint-Colomban-des-Villards était prévue le 7 mars dernier. Elle devait être suivie, le même jour à 21 heures, par une réunion du conseil municipal dont un des points inscrits à l’ordre du jour était le lancement d’un appel à candidatures pour une délégation de service public (DSP) de type affermage après l’échec (aucun candidat, lire ICI) de l’appel à candidatures lancée le 6 janvier dernier pour une DSP de type concession (l’ensemble des investissements sur le domaine skiable étant à la charge du délégataire). Reportée, cette visite préfectorale s’est déroulée le 12 mars (*). Également reportée à une « date ultérieure », la prochaine réunion du conseil municipal n’est pas encore reprogrammée…
Quel bilan tirer de cette rencontre ? Sans compte rendu officiel, on ne peut que s’en remettre aux informations qui ont fuité depuis, ici ou là, et qui, toutes, vont dans le même sens. À savoir que les « services de l’État » (sans qu’on sache très bien ce que recouvre cette expression) aussi bien que les représentants de la société Savoie stations domaines skiables (SSDS) auraient « très fortement » recommandé aux élus de Saint-Colomban de confier (« contre une location ») la gestion du haut du domaine skiable (téléski de Cuinat et télésiège de Bellard) à un exploitant de l’Arvan pour ne conserver que l’exploitation du bas de la station qui se réduirait alors au domaine de La Pierre (Épinettes et Rogemont). Dans cette organisation, la pente de l’Ormet ne serait plus ouverte aux skieurs et, naturellement, il n’y aurait pas de liaison entre ces deux sous-domaines puisque l’installation d’un téléporté ne peut pas être financé et que le télésiège de Charmette coûte trop cher à exploiter (sans parler des questions de sécurité qu’il poserait « très sérieusement »). De l’avis de beaucoup (élus comme socioprofessionnels) cette réorganisation signerait l’arrêt de la station de Saint-Colomban. Elle est donc vécue comme une « tragédie ».

C’est dans ce contexte qu’intervient la démarche de Paul Paret, membre de la commission communale du domaine skiable de Saint-Colomban-des-Villards. Un peu plus de deux mois après la publication de son « Plaidoyer pour éviter une fermeture possible de notre station de Saint-Colomban-des-Villards » (lire ICI), Paul Paret vient de rendre public (18 mars 2025) un article intitulé « L’avenir de notre station de Saint-Colomban-des-Villards : tout se joue maintenant » (lire ICI). S’il est plus complet que le précédent sur ce qu’il conviendrait de faire pour relancer la station – comme le serait un programme électoral auquel il fait immanquablement penser –, ce nouveau texte qui comprend 3 annexes ne répond cependant pas aux interrogations qu’avait soulevées le premier, à savoir : qui financerait ces propositions et comment. Une faiblesse soulignée par ses premiers lecteurs.

Par ailleurs, jugeant qu’il « faut absolument maintenir la station ouverte sur la saison 2025-2026 », Paul Paret estime qu’il est « urgent de prendre, à très court terme, toutes dispositions pour que la station ne ferme pas à la fin 2025 ». Et notamment : « Demander aux autorités de tutelle, Monsieur le préfet, Madame la sous-préfète, Madame la député, de bien vouloir avec SSDS proroger de 1 an la DSP d’exploitation en régie intéressée et prendre contact avec M. Pascal de Thiersant, gérant de SSDS, et M. Julien Mairot, directeur opérationnel de SSDS, afin d’en discuter les termes. » Cette disposition transitoire accorderait à la commune un an de réflexion supplémentaire pour trouver une issue à la crise. Mais, outre qu’elle laisse sans réponse la question de savoir qui prendrait en charge le déficit d’exploitation de cette saison supplémentaire puisque la commune ne devrait plus pouvoir le faire (avis de la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, lire ICI), cette demande de prorogation d’un an a très peu de chance d’aboutir, SSDS ayant clairement laisser entendre, à plusieurs reprises, qu’elle n’irait pas – comme à Albiez du reste – au-delà du terme de la DSP en cours (novembre 2025).
Les autres propositions de Paul Paret s’inscrivent dans celles débattues depuis des mois entre des Villarins déchirés, les uns, volontaristes, les jugeant à la fois cruciales et réalisables, les autres, incrédules, les estimant inapplicables compte tenu des capacités financières de la commune et de son isolement…
L’avenir de la station est donc suspendu au résultat de la DSP de type affermage que la commune va lancer dans les prochaines semaines. Une situation semblable à celle qu’on peut observer à l’Alpe du Grand Serre, station dont le sort sera scellé le 10 juillet prochain par la communauté de communes de La Matheysine (CCM) qui a choisi de lancer (très prochainement) une DSP à la fois en affermage et en concession. « Cela permet indique Coraline Saurat, présidente de la communauté de communes, d’une part de faire peser le risque de l’exploitation sur le futur délégataire et au futur délégataire de porter l’ensemble des investissements sur le domaine skiable, à savoir les remontées mécaniques et toute l’activité liée à la neige. L’intercommunalité portera les investissements sur la partie diversification. Si nous portons seuls les investissements sur le domaine skiable, nous avons bien vu que cela n’était pas viable. » Concernant les investissements sur la partie diversification, Coraline Saurat a précisé qu’ils seront « finançables à partir des ressources locales (…) à hauteur de 1,5 million d’euros » (lire ICI).
Si les démarches entreprises à Saint-Colomban et à l’Alpe du Grand Serre sont identiques, les deux contextes économiques ne sont pas comparables d’autant que le budget (primitif) de la commune de Saint-Colomban-des-Villards (2,5 millions d’euros en 2025) est plus de 7 fois inférieur à celui de la CCM (18,4 millions d’euros en 2025). Dans ces conditions, les difficultés économiques de la station de l’Alpe du Grand Serre apparaissent moins alarmantes que celles de Saint-Colomban. Au total, 2,7 millions d’euros auraient été déboursés depuis 2017 par la CCM pour assurer le fonctionnement de la station iséroise (en moyenne 380 000 euros par exercice) dont le chiffre d’affaires (CA) s’établirait entre 800 000 et 1 million d’euros en moyenne chaque saison (1,2 million d’euros attendus cette année). Loin des données villarinches (600 à 700 000 euros de CA et probablement près de 1,2 million d’euros de déficit cette année).
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(*) Cette rencontre s’est déroulée le matin en mairie et poursuivie, vers 13 heures, à l’Auberge du Coin, par un déjeuner-travail auquel avait été conviée Jacqueline Dupenloup maire de Saint-Alban-des-Villards. Étaient présents autour de François Ravier, préfet de la Savoie, Bernard Airenti, ancien directeur départemental de la sécurité intérieure et de la protection civile de la Savoie et désormais conseiller montagne du préfet, Karima Hunault, sous-préfète de Saint-Jean-de-Maurienne, et son conseiller montagne, Pascal de Thiersant, gérant de SSDS et président du directoire de la Société des 3 Vallées, Julien Mairot, directeur des opérations de SSDS, Pierre-Yves Bonnivard, maire de Saint-Colomban-des-Villards, et le conseil municipal.↩︎
■ Photo de « Une » : le haut du domaine skiable de Saint-Colomban. – (Photo Geoffroy Delabre, www.remontees-mecaniques.net.)