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Lectures en plein air à la croix des Charrières et voyage aux Kerguelen…

Pour la première édition de Lectures en plein air, le choix des textes avait été inspiré par le travail fait sur les hameaux abandonnés par Yannis Nacef et nous avait conduits à Bon Mollard et aux Granges. L’an passé, le thème proposé était le sport et la montagne, de l’effort physique quotidien de nos anciens à l’effort choisi, jusqu’aux sports de l’extrême aujourd’hui…

Le 18 juillet dernier, les liseuses, dont le cercle s’est encore élargi, avaient choisi des textes incarnant l’émotion de la rencontre avec la montagne. Émotion face à la perte de ce qu’elle engloutit, émotion à la recherche des mots, émotion simple à la fréquentation des bêtes qui y paissent, émotion initiale de la première rencontre ou de la recherche de sensations plus extrêmes, au bord du vide…, les liseuses n’auront pas encore épuisé les textes qui disent ce qui se passe en nous lors de telles expériences. Et l’on s’aperçoit que depuis Rousseau ou Élisée Reclus, ces émotions ne sont pas devenues si différentes devant l’étrangeté radicale que constitue la montagne et de ce à quoi elle nous confronte, parce que ce sont nos peurs comme nos joies qu’on y perçoit.

Les liseuses ont lu des extraits des œuvres de Clara Arnaud (Et vous passerez comme des vents fous lu par Claire Martin-Cocher), de Valentine Goby (L’Île haute par Martine Verlhac), Élisée Reclus (Histoire d’une montagne par Josette Lièvre), de Simon Parcot – qui a animé l’été dernier une randonnée philosophique à Saint-Colomban-des-Villards (*) – (Le Bord du monde est vertical par Françoise Vanini), de Brice Delsouiller (Des nuages plein la tête, par Joselyne Martin-Garin), de Jean-Jacques Rousseau (Les Confessions, par Joselyne Martin-Garin), de Jean-Christophe Rufin (Les Flammes de pierre par Christine Martin-Cocher), de Nicolas Le Nen (Affaire classée à la Meije par Marie-Andrée Saunier qui était venue de Saint-Rémy-de-Maurienne), et de François Garde (Marcher à Kerguelen par Jacqueline Dupenloup).

Une quarantaine de personnes furent là, dans l’intimité et les ombrages de la croix des Charrières pour entendre et percevoir ce que nous fait la montagne. Une seconde séance de lecture aura lieu le 8 août en Champ Rey (sortie sud du Chef-Lieu de Saint-Colomban, au-delà du camping GCU), sur le même thème mais avec des textes différents.

■ – (Photo Odile Tronel-Peyroz.)

Après avoir partagé apéritif et toasts dans la cour de la mairie de Saint-Alban, il était temps de se rendre, au-dessus, dans la salle du conseil municipal pour assister à une conférence car, cette année, les liseuses avait invité François Garde pour parler de son livre Marcher à Kerguelen paru aux Éditions Gallimard (2018) – « récit d’une traversée à pied de la Grand-île déserte, froide, rocheuse et humide de l’archipel des Kerguelen, possession française au sud de l’océan Indien, pendant vingt-cinq jours sur 200 kilomètres » (Éditeur).

Même si, comme l’a très bien dit Jacqueline Dupenloup dans son texte de présentation : « Il faut dire la vérité : quand vous êtes savoyarde et pas grand-chose d’autre, évidemment « la montagne émotion » ça vous a pris assez vite, de l’alpage du Bacheux au berceau de la Grande Casse mais, spontanément, vous ne l’associez pas aux quarantièmes rugissants… et à l’océan Indien. Grande inculture me direz-vous. Certes. Il m’a fallu un petit temps de latence pour me dire… mais… ce livre de François Garde, Marcher à Kerguelen, bon d’accord, c’est peuplé de goélands, de manchots royaux, d’éléphants de mer, de pétrels… mais aussi de cols, de névés, de barres rocheuses, de falaises… et d’émotions, au singulier ou au pluriel, ça c’est sûr. Top là, je lirai des extraits de Marcher à Kerguelen, même sans chamois, sans bartavelles et sans marmottes, je suis dans le sujet. Et François Garde, l’auteur, cofondateur du salon du livre de montagnes de Passy, en Haute-Savoie, n’est peut-être pas si loin. De là à lui proposer de venir en personne parler de son livre, il n’y a qu’un pas. »

■ L’écrivain François Garde. – (Photo Librairie des livres et vous.)

Une quarantaine de personnes ont assisté à cette causerie en présence de Chiara Vallin-Canciani, gérante de la Librairie des livres et vous de Saint-Jean-de-Maurienne, qui présentait sur une table une dizaine d’ouvrages de l’auteur.

Durant près d’une heure et demie, François Garde a projeté des photographie prises tout au long de ce périple de 25 jours (effectué en compagnie d’un guide, un ancien officier de marine et un médecin) qui a consisté à traverser du Nord au Sud, 200 km à pied, l’île de Kerguelen, située tout au sud de l’océan Indien, qui fait partie des Terres australes et antarctiques françaises, un territoire que François Garde connaît parfaitement pour en avoir été durant 4 ans (2000-2004) l’administrateur supérieur avec rang de préfet.

L’écrivain a raconté les conditions rencontrées, extrêmement dures (froid, vent constant, humidité…), et l’immense bonheur à parcourir cette île où il n’y a pas de sentier et avec des cartes anciennes et peu précises…, île sur laquelle il n’y a que deux cents personnes, pour la plupart jeunes, qui collectent des données lors de missions scientifiques et qui n’est desservie que par bateau 4 fois par an et de manière irrégulière… En cas d’urgence il faut attendre qu’un bateau de la marine nationale basée à la Réunion soit disponible et arrive, soit 7 jours…

L’auteur a parfaitement su faire partager avec simplicité ses émotions et ses joies et a conquis le public en agrémentant ses commentaires de remarques ou d’anecdotes sur la géologie des lieux, la tente pour 3 utilisée à 4…, le sac de 25 kg, ses peurs (« Mais la trouille n’est-elle pas l’autre nom de l’esprit de responsabilité ? »), 8 à 10 heures de marches par jour en autonomie totale dans une constante humidité, etc.

Un très beau moment qui s’est terminé par des questions, des dédicaces et des… idées de randonnées !

Josette Lièvre
et Martine Verlhac

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(*) Le Petit Villarin numéro 205, septembre 2023.↩︎
■ Photo de « Une » : les liseuses. – (Photo Danielle Favre-Trosson.)

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